Project

General

Profile

News

Reconnaissance (177 comments)

Added by Chroniques d'Atys over 15 years ago

L'Empereur Dexton lisait les nombreux compte-rendus sur la construction des camps dont il avait ordonné la construction. Tout semblait bien se passer, le peuple Fyros donnait son maximum et les courriers des tribus étaient aussi nombreux que les rapports. Mais une missive attira particulièrement l'attention de Dexton ; La tribu des Percécorces n'écrivait plus à l'Empereur, et pour être franc, il n'y avait plus la moindre correspondance à l'initiative d'une des deux parties depuis longtemps. La lettre était alarmante, non pas sur les ressources récoltées ou la vitesse de livraison, ni même sur une quelconque nuisance, mais sur la méthode de construction elle-même. A la fin de la missive, la tribu proposait l'envoi de deux ingénieurs pour donner conseils et méthode aux artisans sur place. Après un long moment de réflexion, Dexton décida qu'il ne pouvait pas prendre de risque. Il fit alors convoquer son Fils, Lykos, et lui transmit ses consignes ...

Quand sharümal sortit du bureau de son père, il était ferme et décidé. Il convoqua Decalion, puis organisa promptement l'expédition d'escorte. La tribu confirma l'heure et le point de rendez-vous rapidement* ...

[*] HRP : Le jeudi 25 juin à l'entrepôt des quatre chemins à 21h00.

Ailes de Sèves (238 comments)

Added by Chroniques d'Atys over 15 years ago

Rodi di Varelo, conseiller du Roi, se tenait devant Sa Majesté, accompagné du botaniste royal Cuiccio Perinia. Tuteur du Collège Royal, il présentait la dernière invention du botaniste : des fibres résistantes, pour faire des tentes d'une durabilité inouie. Le Roi, fier sur son trône, hochait de temps en temps la tête. Il se leva, et dit :

"Bien, bien, bien ... Organisons donc une sortie pour faire un tour rapide des chantiers et la livraison de votre trouvaille à 15 heures le Quinteth, Frutor 29, 2e CA 2546*. Nous sommes impatients de voir l'avancée de Nos projets. Prévenez Nos sujets à ce propos, Nous nous rassemblerons au Belvédaire. Ils pourront venir Nous escorter et profiter de Notre présence pour livrer les campements. Je réserve des projets pour celui qui se montrera être le meilleur..."

Le Roi se leva et se rendit dans ses appartements, pour se reposer.

[*] HRP : Mercredi 24 juin à 21h00.

La Chute (54 comments)

Added by Chroniques d'Atys over 15 years ago

L'archiviste rangea soigneusement cet écrit de Cuiccio Perinia, issu de ses premières chroniques, relatant de la fin du tyran Jinovitch.

« Fieldo ! Ouvre ! C'est Merio !
- Mot de passe ?
- Yrkanis Aiye¹, murmura le matis encapuchonné. »
La porte s'ouvrit, le matis s'engouffra dans l'ouverture et la porte se referma sur le silence de cette nuit sombre, comme oppressée par le règne d'un Roi illégitime, où l'espoir brillait tel l'Astre du Jour lui-même. Yrkanis était toujours vivant, et la nouvelle rallumait l'espoir de voir un jour la tyrannie du Félon cesser dans le Royaume des Sommets Verdoyants.

***

« Aaaaaah ! Le scélérat ! Le fils de gingo ! Fait comme un yubo dans une cage de bambou offerte à Notre Personne ! Je le jure sur Jena ! La Karavan ! Je vais l'étriper et arborer sa tête devant le palais ! Et je ferai un bûcher pour sa misérable petite personne ! Je suis le Roi, je suis l'Elu ! Je suis le KARAN !
- Oui Monseigneur. Vous êtes celui que Jena a touché du doigt, béni soyez-vous. »
Les yeux exorbités, le Roi Matis terrifiant fulminait, furieux. Ainsi son neveu s'était caché comme une proie chez les Trykers ! Et ses homins en position aux Eaux de Jino avaient déposé les armes sans même combattre pour jurer fidélité à ce vaurien ?! Alors tel un habile gingo, lui, Jinovitch, élu de Jena, Roi du Royaume des Sommets verdoyants, demi-frère de feu Yasson-Karan, allait le débusquer de son trou à yubo ! Un frisson parcourut son corps entier à cette pensée des plus réjouissantes. Oui, il capturerait enfin son neveu, dernier obstacle à son règne, reprendrait les Eaux de Jino et marcherait jusqu'à Fairhaven, et sur la Place des Gouverneurs, devant leurs partisans pieds et poings liés, au nom de la Déesse, il brûlerait Still Wyler l'imbécile et Yrkanis le fugitif. Et alors ... Alors Jinovitch deviendrait le Roi incontesté du Royaume. Son Royaume. Le Royaume de Jena.

« Monseigneur ? Quels sont vos ordres ? »
Tel le bruit d'un moustique à l'oreille d'un endormi, la voix le ramena à la réalité et agacé, il aboya ses directives :
« Fais préparer les mektoubs, fais sonner le rassemblement ! Que Nos troupes soient prêtes ! Nous partons à la tombée de la nuit pour les Eaux de Jino ! Elles ne resteront pas aux mains de ces esclaves de trykers longtemps ! »
Le matis s'inclina et sortit à reculons des appartements du Roi. Ce dernier, grisé par des sentiments trop éphémères à son goût, se rendit dans une pièce où il pourrait prier jusqu'au moment du départ. Et si on le dérangeait, il saurait faire en sorte que le fautif ne réitère pas.

***

Le regard vert s'attardait sur la vision enchanteresse du hublot du bureau spacieux du Gouverneur de Nouvelle Trykoth. Still Wyler, attablé comme de coutume à ce bureau plus grand que lui et envahi par les parchemins des plus divers, semblait réfléchir et ne pas se préoccuper de la présence incongrue de son invité. Cela ne dérangeait pas le matis, bien au contraire.
Après de nombreuses heures de discussions, Still Wyler en était venu à la conclusion que le matis devait attendre encore un peu avant d'entamer son projet, ce qui déplaisait fortement à son visiteur.
« Comprenez, Prince, une précipitation en ces conditions serait aussi néfaste que par le passé, à vous comme à la Fédération. Nous avons certes assez d'homins pour renverser Jinovitch, depuis que vos sujets ont prêté à nouveau serment devant l'étendard de votre père, lors de la bataille des Lagons de Loria … des Eaux de Jino, rajouta le Gouverneur en grimaçant, mais j'ai besoin d'un peu plus de temps que vous pour préparer mes homins à une bataille qui n'est pas la nôtre, mais la vôtre, Prince. Mon peuple ne peut effacer aussi facilement que moi les horreurs subies, alors, tout ce que je demande, c'est un peu de temps, afin que nous soyons au mieux, tous deux, pour reprendre votre Trône. »

Aussi insondables que les glaces qui recouvrent les terres du Royaume en hiver, les yeux du Prince Yrkanis, fils de Yasson, descendant de Zachini, se tournèrent avec lenteur et grâce pour se planter dans ceux du Corsaire.
« Nair-Gouverneur, répondit-il d'un accent marqué par son origine, Je n'aurai de cesse de combattre le Félon pour accéder au trône qui m'est dû. Feu mon père Yasson, Roi des Sommets verdoyants, fut le premier à périr de la main de ce grotesque despote et je ne saurai le laisser supplicier encore nombre des miens, d'autant plus que...
- Un message de la plus haute importance pour le Gouverneur ! » fit une voix dans le couloir, avant que des tambourinements violents se fassent entendre à la porte du bureau.

Si le Prince était vexé de s'être fait interrompre en pleine argumentation, il n'en montra rien, et amusé, Still Wyler hurla encore plus fort que le coursier pouvait entrer et laisser tranquille cette porte qui ne lui avait rien fait. Le coursier, essoufflé, entra, et fit des yeux ronds en voyant le Prince Yrkanis assis en face du Gouverneur. Son sang ne fit qu'un tour, il se jeta à plat ventre sur le sol de la pièce en bredouillant des salutations des plus expressives, puis, sur un toussotement du Gouverneur, se remit promptement sur pieds et accourut apporter un pli venant du front des Eaux de Jino. Maladroit qu'il était, il se prit le pied dans le lourd tapis sur lequel reposait le bureau et se vautra de tout son long sur le Prince Matis. Le silence se fit dans la pièce, et seuls les bruits dus à l'immersion des quartiers du Gouverneur agrémentaient cet instant gelé dans le temps. Still Wyler fut soudainement pris d'un fou rire, repris en chœur par le coursier. Le Prince serrait les lèvres, attendant que l'instant passe.
« Et donc, ce message ? demanda le Prince d'un air quelque peu offusqué qu'un simple Tryker ose se vautrer sur lui.
- Ah, oy, m'sieur ! »
Le coursier tendit le pli au Gouverneur, qui, remis de ses émotions, l'ouvrit et le parcourut avant de le tendre, la mine sombre, au Prince. Au cours de sa lecture, les sourcils du matis se froncèrent et lorsqu'il eut reposé le pli sur le bureau, il fixa le Gouverneur dans les yeux.
« Il semblerait que nous n'ayons pas à attendre davantage, Nair-Wyler. Jinovitch est en chemin pour la Frontière. »
Le Gouverneur regarda longuement le Prince. Quelque chose dans cet homin lui plaisait, mais il n'aurait su dire quoi. Contre toute attente, Still Wyler se tourna alors vers le coursier et lui demanda de ramener deux « Bières d'Avendale ».

***

L'armure du tyran grinçait au gré des mouvements de l'impressionnant mektoub de monte. A ses côtés, le Général Fieldo di Maricio avait l'air pensif. Il y avait deux jours que les deux matis dirigeaient l'armée la plus grande que Jinovitch ait jamais contrôlée, en s'accordant de brèves pauses pour se restaurer et se reposer. La frontière entre les Sommets Verdoyants et l'Aeden Aqueous n'allait pas tarder à être en vue. Nul chant matis ne résonnait contre les parois du Labyrinthe des Lutins, et seuls les hurlements à glacer le sang des homins les plus courageux ainsi que les bruits d'une armée en marche venaient briser le silence. Fieldo se tourna vers son Roi :
« Na-Karan, navré de briser ce silence pendant que Vous communiez avec la déesse, mais les homins fatiguent, il serait peut-être bon de s'arrêter pour aujourd'hui et faire une pause. Nos troupes seront en meill...
- Silence ! Rugit le tyran, Nous ne souffrirons que plus d'attente, cela fait trop longtemps que Nous attendons le moment d'écraser ce misérable insecte qu'est ce fils de Fyros ! Nous continuerons jusqu'à la frontière sans nous arrêter ! Nous avons parlé. »

Fieldo di Maricio coula un regard discret à son compagnon Merio Pradio, mais se garda bien de défendre le nom d'Yrkanis, fils de Yasson, ainsi outragé et souillé par le Félon. Après tout, sa place de Général ne tenait qu'à un fil, seulement parce qu'il avait servi sous les ordres d'un fidèle partisan de Jinovitch qui était mort de vieillesse récemment. En songeant à la mort, les yeux dans le vague, Fieldo eut un pincement au cœur en se remémorant le « jour du supplice », où le Grand Architecte du Vivant, Bravichi Lenardi, avait péri dans d'atroces souffrances, ainsi que bon nombre de fervents du Prince disparu. Et la raison pour cela était seulement d'avoir aidé le Prince légitime à s'enfuir. Il frissonna, espérant à tout prix que Jinovitch ne lisait pas dans son esprit. Qui sait ce qu'un Roi pouvait faire, après tout ?

Un cri parcourut le carré parfait que formait une division derrière lui. Il se retourna vivement, héla l'officier en charge de ce régiment et demanda en hurlant ce qu'il se passait. Les homins désignaient du doigt quelque chose droit devant l'armée. Il se retourna et, son sang ne faisant qu'un tour, vit l'horreur la plus immonde en face de lui : des kirostas, soldats d'élites des Kitins, les ennemis mortels des homins. Mais les Kitins ne semblaient pas, pas encore du moins, avoir vu les homins et continuaient leur route, lentement, comme s'ils avaient voulu prendre leur temps.
Un rayon de l'Astre du Jour traversa la couche épaisse de nuages de l'hiver et forma comme une ligne entre Jinovitch, qui avait continué à avancer, enfermé dans son mutisme, les yeux dans le vague, et les troupes du Félon. Jinovitch sembla sortir de sa torpeur et remarqua les Kitins. Il hurla :
« Pour Jena !!! Pour Nous ! CHARGEZ ! »

Puis, Jinovitch, Roi matis, chargea.

***

Yrkanis regardait fièrement ceux qui avaient tout abandonné pour le suivre, au cours de ces longues années d'exil, avec cet éclat dans les yeux, cet éclat qui, plus que son héritage, le définissait comme Prince. Ils avaient quitté la quiétude de la capitale de la Fédération avec une armée incommensurable, comprenant de fidèles matis, fiers sous le blason de Yasson, et d'intrépides trykers. Si certains matis redoutaient l'affrontement contre leurs frères, les trykers étaient d'humeur joyeuse et scandaient des chants mettant à mal de manière quelque peu paillarde la bienséance Matis.
Le Gouverneur chevauchait son mektoub de monte aux côtés du Prince de sang, en racontant les dernières bêtises de sa fille unique Locian à une Shaley Nara impassible, mais néanmoins respectueuse. Puis le Gouverneur se tourna vers le Prince et lui demanda non sans intérêt :
« Un cœur vous attend chez vous, nair-Prince ? »
Malgré lui, Yrkanis sourit en pensant à Lea Lenardi, fille de son défunt mentor. Son sourire se perdit quand il repensa à l'immense perte causée par Jinovitch et répéta mentalement une prière qu'il faisait souvent à Jena, jurant de détruire lui-même celui qui avait détruit sa vie. Il se contenta de répondre, revenant à la réalité, une phrase banale :
« Oui, une charmante jeune homine de haut rang comme il sied à un Prince comme moi. »

Still Wyler ne put s'empêcher de bombarder le matis de questions concernant l'élue de son cœur tandis qu'ils dépassaient la ville d'Avendale, où les citoyens acclamèrent les héros et joignirent les rangs de l'immense armée. La bataille promettait d'être féroce, les Trykers n'étant pas les plus démunis au combat. Ils arrivèrent aux Lagons de Loria, et Still Wyler devint plus froid, plus tendu, au fur et à mesure qu'ils approchaient de la frontière. Le chaleureux Gouverneur se préparait au combat. Les chants commencèrent à diminuer. Le silence des armées prit place. La tension gagna... La peur aussi...

Arrivé à la frontière, où les vestiges de camps matis abandonnés se faisaient une raison et se laissaient piller et violenter par le monde sauvage, Still Wyler se dressa sur le dos de son mektoub sous les yeux inquiets de Shaley Nara. D'une voix plus puissante que l'on aurait attribuée au Tryker qu'il était, il parla à son peuple comme aux matis :
« Aujourd'hui, nous allons marcher sur le Royaume du Félon, celui-là même qui nous imposa des taxes, des humiliations et de lourdes pertes ! Aujourd'hui, aux côtés du Fils de Yasson et de ses fidèles, nous allons nous battre, pour ce qui nous tient à cœur : ba Tryka² ! Aujourd'hui nous allons, vous et moi, être égaux, et nous battre ! »
Attendant que les ovations et les vivats se taisent, il marqua une courte pause puis leva les mains, demandant le silence. Il reprit :
« Je ne tolèrerai aucune cruauté de votre part car nous ne sommes pas comme le Félon, et en tant que Chef de cette armée, je vous demanderai de vous plier, pour une fois, rajouta-t-il avec un sourire, aux directives. Cette bataille, nous l'avons voulue, et, plus tôt que je ne l'aurais souhaité, il va nous falloir la mener et la gagner ! Puis nous marcherons vers Jino, pour asseoir le Prince Yrkanis sur le trône de Fleurs, et enfin espérer la Paix que nous attendons tous ! Citoyens Trykers ! Sujets Matis ! Aujourd'hui, l'Histoire s'écrit et nous en serons la plume, le sang du Félon en sera l'encre. »

Il se rassit sur sa selle, porta sur sa tête le heaume-couronne des Gouverneurs de Trykoth que Shaley Nara lui tendit, puis prit son immense pique ondoyante, symbole de son statut. Il la leva vers le ciel, hurla « Tor Lochi³ ! », puis il passa la frontière entre les deux pays, suivi de centaines d'homins qui scandaient les mêmes paroles. Les matis hurlaient « Yrkanis Aiye ! ». On ne mélange pas les bières et les liqueurs, chez les matis.

***

La bataille n'eut jamais lieu. L'étrangeté du rayon de l'Astre du jour séparant le Karan de ses homins frappa les soldats, qui y virent une manifestation divine de Jena, ordonnant à ses fidèles de laisser le Félon mourir. Jinovitch chargea ainsi la dizaine de kirostas qui le virent, se jetèrent sur lui et le dévorèrent à grands bruits capables de retourner l'estomac du fyros le plus grossier. Les kitins repartirent dans la direction opposée aux soldats après leur frugal repas. Le silence cueillit les matis après cet immonde spectacle. Jinovitch ne réapparut jamais, il était mort. Jena et ses envoyés de la Karavan l'avaient abandonné. Comme pour confirmer l'intervention divine, une armée arriva peu de temps après la disparition du Félon, avec à leur tête le Gouverneur Still Wyler et le Prince Yrkanis, acclamés par les troupes de celui qui n'était plus.

Les troupes marchèrent jusqu'à la ville de Jino qui retrouva son nom d'Yrkanis, la belle et magnifique cité du temps de feu Yasson. Le Destin du Prince se mettait en marche.

Il devint Roi des Matis.

Chroniques du temps du Roi Yrkanis par Cuiccio Perinia, Historien Royal.

¹ : Traduit du langage Matis : Yrkanis bénis.
² : Traduit du langage Tryker : La liberté.
³ : Traduit du langage Tryker : Pour les Lacs.

La Chute

Chrysalide (68 comments)

Added by Chroniques d'Atys over 15 years ago

La fuite d'Yrkanis en 2506 après le meurtre de Yasson par Jinovitch, racontée par Baldi Dalia, un témoin de la scène :

La Forêt s'éveillait à peine, jupon de brume et gilet de coton blanc. Ainsi brodé de dentelles délicates, de molletons immaculés et d'ourlets soyeux, Mystia , par ses atours, annonçait sans détours l'hiver et le froid.
Le charretier souffla dans ses mains ankylosées pour se donner une contenance plus que par nécessité. Les nombreuses pelletées de fumier avaient suffie à les réchauffer et c'était, pour l'heure, de courage dont avait besoin Lebi Cabelo, et d'un peu de temps avant de prendre les rênes et diriger son attelage vers la Grande Serre de Jino.
Haletant, aussi rougeaud qu'un Matis puisse l'être, il finit par grimper sur le siège. Le grincement de l'appareil fut aussitôt étouffé par le sifflement aigu de Lebi , et le claquement des lanières de cuir sur le flanc des mektoub.
Les bêtes renâclèrent, avant de s'élancer, sur ce chemin si connu qu'elles auraient pu le parcourir sans leur maître. Ce dernier n'y aurait rien trouvé à redire d'ailleurs, plus tendu que le frein qu'il desserra presque à regret.

Des vapeurs épaisses, bleu pâle, s'élevaient en volutes du chargement, molles, presque lascives, se tordant au rythme des cahots incessants du tombereau. Comme le capitaine absent des vaisseaux fantômes d'autrefois Lebi, semblait flotter sous une nappe de ciel gazeux et glisser sur les crêtes blanches des vagues d'une mer boréale. Dos et trompes émergeant des brumes, monstres imaginaires des cartes maritimes Tryker, les mektoub n'existaient plus, le conducteur matis serrait les rênes comme le marin sert un gouvernail, l'œil vide et l'esprit au loin.
«Capitaine !» songea-t-il, se retournant presque.

Quelque chose scintilla, rappelant l'esprit vagabond, stoppé net au bout d'un fil que l'on tend brusquement. Lumière blanche furtive, mirage. C'est d'abord le corps qui réagit. Les poils s'hérissent, le cœur bondit. Jena...

L'attelage passa devant la Karavan, éclair blanc, cuir noir perlé de reflets liquides et laiteux, matières irisées d'inconnu, silhouettes encapuchonnées, insondables, vénérables...
Le temps fut suspendu, la brume s'évanouit, Lebi tourna la tête lentement, timonier d'un navire, qui passe au large d'une île inaccessible et belle. Comme dans un rêve.

« Nec menates ! »

Mots qui claquent ! Qui frappent sans ambages. Coup de coude dans les côtes d'un dormeur paisible, lumière vive à travers les paupières encore lourdes du matin, le songe prit fin...

Les mektoub réagirent en premier, stoppant net et soufflant bruyamment. Lebi tira sur les rênes, par réflexe, dernier privilège de l'homin sur la bête lorsque l'instinct prévaut.

Cinq gardes et quinte de toux pour un charretier...

« Halte !
- Kof ! Kof ! Kof !
- Ordre du Roi Jinovitch, Fils de Jena ! Nous contrôlons tout chargement suspect dans Jino.
- Kof ! Kof !
- Serrez le frein et cessez de tousser ! »

Lebi hésita un moment. Maugréant : il en avait de bonnes ce garde ! Cesser de tousser... Session de troupier... Troufion de fessier !

« Kof ! Kof ! Kof !
- Cessez de tousser !
- Je ne tousse pas !
- Si vous toussez !
- Non je ris !
- Ha ?
- Kof ! Je ri... sque ma santé pour livrer ce fumier à la Grande Serre de Jino chaque semaine !
- Oui...
- Bien sûr !
- Vraiment ?
- Allons Silvo, tu me connais non ? Je viens de l'étable avec un chargement de fumier pour la Serre...comme chaque semaine que notre Roi bien aimé nous offre !
- Je sais Lebi... Mais j'ai des ordres...
- Alors fouilles vas-y ! Si tu crois qu'un prince se cache dans un tas de merde !
- Lebi !
- Quoi ? »

Silvo et les quatre autres gardes plantèrent leur pique dans le tas de fumier. Ils n'en retirèrent qu'un bruit de succion, une odeur désagréable, la désapprobation d'un charretier et la croupe de deux mektoubs s'éloignant... avec la fierté qui manquait à ce tableau.

« Silvo ?
- Oui ?
- Tu le laisses filer ?
- Et ? Tu crois vraiment qu'un Roi Matis irait se fourrer là dedans ?
- Un roi ?
- La ferme Fulvo !»

Deux choses différenciaient alors Lebi d'un mort : le rythme quelque peu erratique de son coeur et dix foulées de mektoub avant la Grande Serre.

***

Sebio entra dans l'habit-arbre de son maître. C'était un moment unique, qu'il attendait chaque jour de la même façon depuis qu'il était à son service, comme un Esclave de la Sève en manque de drogue.
Il s'arrêta sur le seuil, un instant désorienté par la téléportation. Mais ça n'était pas pour cette raison qu'il tardait à ouvrir les yeux. Il aimait profiter progressivement, méthodiquement de tout cela, comme si sa propre conscience refusait de se laisser emporter. Il n'oublierait jamais cependant la première fois, quand il avait sombré, l'esprit fragmenté comme le pollen dans la tempête, jeté au sol sans ménagement par ses propres sens pris d'assaut. Anéanti.
Sans raison point de beauté disent les matis.

Voyageur, pouvait-il l'être sans bouger ? Connaître le monde au seuil d'une porte, tel était le pouvoir que procuraient ces lieux. Entrer chez lui c'était renaître, c'était pénétrer dans la forêt un soir d'été, après une vie privée de sensations. Tout n'était qu'odeurs, couleurs et sons. La vie, l'émotion, la mort, mêlées, au service d'un seul homin.

C'est d'abord le son qui le transporta. Frémissement, grattement, bouillonnement, gémissement, craquement. Son maître lui avait un jour révélé le secret de ces bruits, la nature elle-même. Il y a de la musique en toute chose, rappelait-il, donnez vous la peine de l'entendre. La vie donne une forme au vide et la musique, au silence.

Et le vide n'existait pas ici. Les fragrances uniques se mélangeaient, tantôt douces, tantôt fortes et agressives. Sebio inspirait profondément, prenant ce cadeau de senteur à pleins poumons. Quand enfin il se décida à ouvrir les yeux, au bord de l'asphyxie, il poussa un soupir de soulagement, ravi par la vision qui s'offrait à lui : troncs veinés et vénérables qui disparaissent dans les feuillages, nuées arlequines, ivoire et vert profond, déversant leur pluie de couleurs, sur un gazon céladon, piqueté d'ambre et de blanc, de corolles florales. Papillons graciles qui volètent ici là, planent sur des rigoles au flot vigoureux, et se posent les ailes ouvertes sur des pétales langoureux.
Et le démiurge solitaire au milieu de son œuvre, assis à son bureau, parmi les homins.

Sebio eut pour la première fois l'impression que son maître tranchait sur l'ensemble harmonieux. Il comprit alors d'où venait le grattement qu'il avait entendu en entrant.

Le vénérable matis, à peine vêtu, noircissait nerveusement, de sa plume une feuille de parchemin. Il y en avait des piles entières posées ça et là, autour de lui.

« Maître ? » hasarda Sebio.

Le vieil homin ne répondit pas tout de suite, continuant à griffonner ses pages comme si rien d'autre ne comptait.

« Maître Lenardi ? reprit courageusement le wivan.
- Ah ! Sebio... Tu es là...
- Oui Ser.
- Fidèle Sebio... Je te libère... Tu peux rentrer chez toi. » souffla Lenardi tout en grattant le parchemin de sa plume.

Le jeune serviteur ne comprenait pas.

« Maître ? Vous me libérez ?
- Oui rentre chez toi mon ami, tu n'es plus un serviteur, plus le mien en tout cas.
- Mais vous ai-je mal servi ?
- Non Sebio. Au contraire, je n'ai plus besoin de tes services c'est tout.
- Mais Maître... Je... »

Le Grand Architecte du Vivant s'arrêta un instant et leva les yeux vers son wivan. Il vit alors les larmes couler sur les joues de Sebio.

« Je... J'ai une tache à te confier, une dernière.
- Ser ?
- Si je disparais, je veux que tu rassembles toutes mes notes, que tu les caches, jusqu'à ce qu'un matis, celui qui portera légitimement le médaillon de Manalitch, les réclame.
- Mais maître, vous n'allez pas...
- Fais ce que je te dis une dernière fois, par Jena !
- Bien. Je le ferai, mon maître.
- Maintenant laisse moi, j'ai du travail. »

***

L'air était vif cette nuit là, les yeux rougis par le manque de sommeil les matis attendaient, tapis dans les buissons qui bordaient l'une des routes du district de Zachini. Depuis quelques temps, les patrouilles étaient innombrables au sein de la capitale et le couvre-feu de mise dès les dernières lueurs du jour éteintes.

« Jusqu'ici tout va bien, murmura l'un des inconnus.
- Je serai tranquille lorsque nous aurons tous regagné nos quartiers et que vous serez dehors, lâcha un autre.
- Moi aussi. Il me pèse de vous faire courir ce risque à tous.
- Allons tout est pesé et emballé depuis longtemps, nous savons tous ce que nous risquons ce soir. »

La lanterne d'une patrouille mit fin au débat. Les pointes des lances et les angles les plus aigus des Paroks rutilantes reflétaient la lumière des lampes vivantes. Chaleur au cœur de la nuit et du froid de l'hiver, ou alors, peut-être, annonce de la mort glaçante. Les fugitifs retinrent leur souffle.

Les gardes passèrent sans même détourner la tête, l'un d'eux toussa à deux reprises, c'était le signal.
Les quatre embusqués attendirent un moment que la patrouille s'éloigne avant de s'élancer vers le belvédère, encore recroquevillés, trébuchant, engourdis par leur attente immobile.

C'était une belle nuit d'hiver. Les nuages, figés, étaient tombés pour couvrir le corps d'Atys d'un linceul immaculé, et Sagaritis se penchait lentement vers elle, amant éternel, pleurant sa bien-aimée. Il posa les boucles de sa chevelure argentée sur le corps froid de l'endormie, la couvrant de baisers. Ses larmes glacées par le gel, piquetaient le ciel d'étoiles, égayant le noir de l'oubli, de lumière et d'espoir. Le coeur de l'astre disparut un instant derrière une étable que ses anneaux entourèrent parfaitement. Fugitif, le temps l'était aussi.

Ils rejoignirent la cible quelques heures avant l'aurore. Reprenant leur souffle à l'unisson, le dos plaqué contre le mur, espérant que la tour de garde ait détourné le regard, ils écoutaient le soufflement paisible des mektoub, diapason du calme à retrouver.

***

« Yrkanis... Mon fils... Il te faut fuir.
- Comment ? Il n'y a pas d'issues. Je suis comme le papillon prisonnier d'une lampe.
- Je l'éteindrai pour toi.
- Éteindre la lampe ou libérer le papillon ? Les Zoraï emprisonnent des insectes dans leur lumière, est-ce là qu'il faut chercher la solution ?
- Le temps n'est pas à la contemplation, mais à l'action. Les Zoraï figent les créatures volantes dans l'ambre pour marquer leur pouvoir sur le temps. Toi l'héritier de Zachini, tu graveras ton empreinte sur l'Histoire.
- Maître...
- Cesse de m'appeler Maître, tu en sais à présent presque autant que moi. Ton père a fait de moi ton parrain il y a longtemps....
- Yasson est mort prématurément et...
- Oui ! Assassiné.
- ...
- Je lui ai promis de t'inculquer les valeurs que nous partagions, celles des matis. Je lui ai promis de faire de toi un homin noble et valeureux... Un modèle comme il l'était.
- Père...
- Oui... J'aurais voulu être le tien. Ma plus grande œuvre.
- Mais Lea ?
- Je chéris Lea car elle est ma chair. Je l'aimerai même lorsque mon corps détruit ne retrouvera pas le chemin de la vie. Car le temps viendra où Jena brisera le pacte pour m'accueillir en son sein, comme Elle l'a annoncée. Mais c'est toi l'héritier... Fils de Yasson. Et je dois être fidèle à la parole donnée. Quitte la ville, l'exil t'attend, Jinovitch a vu ta fuite, mais elle ne se passera pas comme il l'a prévue.
- Mon oncle sait ?
- Bien sûr, il l'appelle de ses vœux car il veut te tuer comme il tua ton père.
- Que dois-je faire ?
- Tu dois te comporter comme un insecte. Mais pas le papillon que tous, aux aguets, s'attendent à capturer dans leur filet, pour mieux l'écraser, non...
- Que serais-je ? Père ?
- Un ver, tu seras un ver... »

***

Ils furent avalés un à un par l'obscurité de la mektouberie, ventre protecteur de quelque animal de mythologie. Le masque était là, caché dans les entrailles de foin. Joyau de science sur la simplicité faite écrin.

Ils se regardèrent un moment sans parler, ils auraient voulu se jeter dans les bras l'un de l'autre, se donner de grandes claques dans le dos pour étouffer les sanglots, pour stopper quelques larmes qui montaient trahissant leur tristesse. Mais ils étaient matis, nobles et fiers et ne devaient pas montrer leur faiblesse.

« Eh! Bien il est temps... » dit l'un deux, pour briser le silence et raffermir sa voix.

Le froid facilitait les choses car les yeux rougis, les joues empourprées, et les larmes figées en stalactites de gel, masquaient les émotions bien mieux que le meilleur des aplombs.

« Filenai ! Nai Sondei ! continua-t-il
- Na Karan ! » Répondirent-ils en cœur.

Ils s'étaient dit au revoir avant de partir. Aucun ne flancha en effusion. Ils savaient tous ce qui les guidaient et leur loyauté n'avait pas de faille. Parmi eux aucun fyros et pourtant ils brûlaient tous du feu sacré qui anime et brûle ceux qui frôlent la mort à l'unisson. Par amitié.

Le Matis se dévêtit complétement. Quittant les oripeaux d'une vie passée, mis à nu, fragile et fort à la fois, présent difficile et future destinée, Yrkanis se préparait pour autre chose. Vermisseau prisonnier, les cieux peut-être l'attendaient, cadeau de Jena pour ses ailes anémiées ou rançon définitive des erreurs commises.
Le prince inspira profondément avant d'avaler le breuvage qui l'aiderait à tenir si longtemps étouffé, privé de sens, en mêlant l'essence et le temps. Le cœur faiblit, pour ne plus battre qu'au diapason d'un Moi inconscient des secousses du chariot.
Rodi l'aida à enfiler le masque puis à s'allonger dans le tombereau. Il lui fallait renaître.
Graine issue d'un arbre millénaire, éternel aubier, ils le plantèrent dans leur engrais, nourrissant le terreau de leurs ancêtres. Il fallait rompre l'enchantement d'un Roi merdeux par le pouvoir du fumier.

***

Lebi Cabelo tira sur les rênes pour stopper l'attelage à l'arrière de la Grande Serre. Les restes desséchés de la précédente livraison formaient une plaque noire contre le tronc gris du bâtiment.

Le charretier soupira en constatant qu'il était dans les temps. Le jour se levait lentement mais l'ombre du grand arbre au fronton de chitine couvrait encore la scène d'une obscurité protectrice.

Ayant adroitement manœuvré les bêtes, il serra le frein, libéra l'attache qui maintenait la remorque et sauta prestement à terre avant de s'emparer d'une pelle qui trônait, plantée comme un autel au milieu du chargement qui se déversait lentement.

« Deles silam ! »

Lebi, occupé à pousser le fumier avec la pelle, suspendit son geste, en entendant la voix erraillée.

« Delées silAam ! Je suis BAaldi DaliAa, jAarrdinier de la Serreuh !
- Hummm....
- Vous êtes LEebii CAabelo, on m'Aa prévenu de vOotre Aarrivée !
- Sil...
- Jee suis Iici pour contrOôler votre chArgement.
- Je vois, alors allez y. Contrôlez.
- FilAa ! »

Le jeune jardinier s'effondra dans le fumier, le crâne fracassé par la pelle du charretier. Ce dernier, haletant, les cheveux collés par la sueur de l'effort et du stress, resta immobile un instant, serrant encore le manche de la bêche, lame levée, ensanglantée.

Quelque chose glissa soudain sans bruit du chariot dans le tas fumant. Un gémissement... Lebi poussa un cri, s'apprêtant au combat. Il suspendit son geste à temps, comme s'il se réveillait d'un cauchemar au sommet de l'escalier mortel. Il jeta la pelle au loin.

« Na Karan ! » s'exclama-t-il en se précipitant vers la forme larvaire qui gesticulait dans la fange.

Dou doum... dou doum... dou doum... dou doum... dou doum... dou doum... dou doum... dou doum...

Le cœur du Prince pompait le sang, extirpant les toxines du corps d'Yrkanis.

Hhhhhhhhheuuuuuuuufffffff ! Eructa le matis en arrachant le masque, absorbant avec avidité l'air qui lui manquait, agenouillé près de Lebi.

« Prince ! Prince ! Il faut fuir ! » Pleurait le charretier.

Mais il ne l'entendait pas, la raison encore éteinte, les sens désorientés, il vomit.

« - P.. ince... fuy... la Kara... ressusciter... jeune... tué.
- Siil...
- Ah ! Mon Prince ! Na Karan, tout ce que vous voulez ! Ne restez pas là je vous en prie !
- Hummpfff...
- Allons partez, suivez le plan, il va revenir et alerter la garde !
- Nae... te...
- Naete ? S'il te plait !?
- Naete... Cesse de crier !Tu me vrilles les tempes !
- Ah Na Ser ! Vous revenez !
- Sil , ça va ... mais par pitié cesse de hurler !
- Maître j'ai tué le jardinier, il va revenir, il faut partir tout de suite...
- Tu sais ce que ça signifie ?
- Oui je le sais... Je les retarderai... Na Karan... Fuyez maintenant. »

Les deux matis se regardèrent, prince et charretier, rênes et règne. Soudain, Yrkanis, se détourna, empoignant le masque qui gisait à ses côté, il s'engouffra dans le soupirail arrière de la Serre qui servait à l'approvisionnement en engrais. Il descendit un moment sur une glissière de bois huilé avant de briser brusquement du séant la croute sèche d'un fumier ancien. Assis sur le trône odorant mais salvateur offert par Lebi, il songea au conducteur d'attelage, il ne l'oublierait jamais.

Le prince connaissait bien la Grande Serre, œuvre de Lenardi. Il n'eut aucun mal à rejoindre les chambres d'embaumement, empruntant des chemins inconnus de la plupart des Praticiens.

Il redoutait cet instant.

Le folklore laissait entendre que la Sève des corps nobles était retirée, offerte aux parents pour nourrir leur habit-arbre, l'enveloppe digérée par les plantes cocons.
Mais Yrkanis savait que la sève n'est pas, chez l'homin, une substance physique et prélevable.
Il prit une dague cérémonielle laissée là par quelque embaumeur avant de s'approcher d'un cocon végétal. Il entreprit d'en inciser la base, libérant un orifice au pied de la large tige. La plante modifiée s'affaissa rapidement, agonisante. Comme le beurre qui fond sous le soleil. Mais c'était l'odeur insoutenable qui sortait du trou qui poussa le prince à remettre son masque.
Il n'hésita pas longtemps avant de plonger la tête dans l'ouverture resserrée. Son corps nu fut aspiré avec un bruit de succion et ses pieds blancs, orteils tendus, furent les derniers à disparaître dans les entrailles organiques de la Grande Serre.

Le temps fut suspendu, alors qu'il évoluait dans le boyau, guidé par les mouvements du chyme de l'intestin végétal, qui lui brûlait au passage la peau.

Aucun homin ne sait encore où il émergea; Rouge, comme la chenille de l'angelio. Mais lorsqu'Yrkanis , fils de Yasson, Roi légitime des Matis, respira l'air de la Forêt, loin de Jino, il n'était plus ni ver, ni chenille. Il était chrysalide et presque papillon.

Il resta de nombreuses années en exil avant que l'histoire et les Matis lui donne raison. Durant ces temps troublés, il n'oublia jamais ceux qui lui avaient permis de s'échapper. Parmi ceux-là beaucoup furent suppliciés. Lebi le charretier, deux des complices fugitifs, Lenardi Bravichi et beaucoup d'autres anonymes furent brûlés vifs. Jena les garde.

Rodi di Varello, put fuir à temps Jino, lors d'une chasse royale. Il est à présent l'un des conseillers du Roi , lui qui posa le masque de survie sur la tête du Prince, comme l'annonce d'un couronnement.
Certains disent que c'est à cause de ce masque que Mabreka accueillit le Roi dans son Pays Malade, il n'en est rien.
C'est le destin, Jena m'en est témoin, qui le guida. Mais qu'est-ce que la destinée quand mourir n'est rien et que l'on peut renaître ? Et qui suis-je moi qui vous conte l'histoire ?

Je suis Baldi Dalia et je suis mort une fois.

Ecrit en 2514 par Baldi Dalia sur des faits survenus en 2506 (JY).

Chrysalide

Et pour quelques dappers de plus (28 comments)

Added by Chroniques d'Atys over 15 years ago

Note de l'archiviste : Ce pli était visiblement à destination d'un certain O'Duffy Garmer, responsable des fournisseurs sur les chantiers des campements militaires lors du Printemps où les tentes fleurirent.

Lordoy nair-O'Duffy Garmer

Je sors d'une inspection des chantiers et j'ai pu constater comme les travaux avançaient avec rapidité. Du moins en ce qui concerne les Criques ensorcelées, les Eaux du Repos er les Cimes Jumelles ... Les camps des Etangs de Loria et du Trou du Silence sont en revanche moins qu'avancés. J'ai bien vérifié là-bas, pensant y trouver un marchand de bière venu perturber le rythme de travail des trykers, mais non, rien ! J'ai donc mené mon enquête auprès des bâtisseurs sur place, et ceux-ci m'ont assuré qu'ils passaient de longues journées, sans bière ni sieste, soit-disant , à attendre que les matériaux et éléments fabriqués à l'entrepôt de Vertval ne leur parviennent.

J'ai dû interroger plusieurs fournisseurs, bière à l'appui, afin de comprendre les raisons des délais de l'approsionnement des chantiers les plus éloignés. Il ressort de ma petite enquête que le trajet menant aux campements les plus éloignés est un peu trop ... le terrain de chasse des gros prédateurs, si tu vois ce que je veux dire ... Si bien que la plupart des mektoubiers refusent d'y conduire leur monture ou mektoub de bât, prétextant un voyage trop long et donc un coût en fourrage trop élevé.

J'ai donc décidé, pour le bien du projet, d'agiter sous les yeux du peuple quelque chose qui devrait le stimuler : afin d'accélérer la construction des chantiers, je récompenserai les mektoubiers ayant livré l'un des six chantiers d'une dotation de 10 000 dappers, perçue lors de la livraison, au campement. Ainsi les mektoubiers seront-ils dédommagés des frais de fourrage. "Le repos ou les dappers, il faut choisir !", dirait mon oncle Ba'Dairi !

Le porteur de ce pli à la belle écriture (tu apprécieras l'effort, j'espère) déposera pour chacun des responsables de chaque campement un petit coffre de bois de racine contenant assez de dappers pour payer les livreurs durant plusieurs jours. Je te ferai ainsi parvenir de manière régulière des sommes équivalentes pour chacun d'eux. Attention, interdit de piocher dedans pour d'autres raisons !

Je te laisse à ton travail,

Ken bai Winni kard sul, yem tala,

Tor Lochi,

Ba'Darins Baksan, 2e CA 2546

Poudre de Sciure (64 comments)

Added by Chroniques d'Atys over 15 years ago

Poudre verte dans sa main. Une si douce sensation... Le soleil était haut et tapait fort dans son dos, mais il continuait son travail, acharné. Fou ? Non, passionné.

Tac ! Tac ! Tac ! Le bruit de la pioche qui s'abat, qui racle la sciure... Schlack ! La matière première est extraite.

Karius Xarinyx forait depuis plusieurs jours en ne s'accordant qu'un bref repos et se nourrissant de peu. Le seul petit plaisir qu'il s'accordait était la liqueur de shooki ambrée qui reposait dans les fontes de son mektoub de bât, qu'il avait nommé Shooki pour l'avoir acheté lors d'une fête trop arrosée. Il ne regrettait pas son geste, mais il en regrettait presque de ne pas avoir été assez vigilant, puisqu'il avait dépensé sans s'en rendre compte la quasi-totalité de ses économies. Tout en creusant et en consolidant les parois de la source exploitée, il sourit en se rappelant la raison de l'ivresse de ce jour-là. Il avait vu le Prince. L'Empereur Dexton avait présenté lors de son dernier discours, pour annoncer le début d'une grande campagne d'édification de « camps militaires », le sharümal¹ à la foule de gens réunis. Karius en faisait partie, et comme la plupart, c'était la première fois qu'il le voyait à l'Agora de Pyr. La compagne de Karius s'était étonnée de sa taille ainsi que de sa beauté. Karius avait répondu qu'il devait tenir de l'Impératrice Xania, non sans un sourire. Sa compagne l'avait gentiment réprimandé. Ce soir-là, il but jusqu'à plus soif et finit à trainer dans les ruelles. C'est ainsi qu'il fit l'acquisition de Shooki et qu'il décida de participer activement à l'érection des camps militaires. Pour les kitins, d'après sharükos². "Peut-être pour voir aussi si les matis vont pas passer à l'attaque", se dit Karius alors qu'il extrayait une énième ressource d'une assez bonne qualité.

Sa source entièrement exploitée, il se releva et porta les matières premières jusqu'à son mektoub, pour les mettre dans les fontes. Le chemin du retour serait salvateur, et il comptait bien rentrer et fêter tout cela avec son homine qui était, elle, partie à la chasse aux kitins non loin d'ici. L'apparition de ces kitins blancs était inquiétante, aussi les patriotes fyros partaient faire des chasses à l'immondice que représentaient les kitins. Pour bon nombre d'entre eux, le Grand Essaim était encore trop près ... Pas assez de sciure n'avait voyagé dans le Désert pour que l'on puisse se permettre d'oublier, d'autant plus que la menace était réelle. C'était loin d'être un souvenir...
Il claqua de la langue après avoir chargé les matières extraites, résultat de son labeur, sur Shooki, et avoir pris une longue rasade de liqueur. Le mektoub le suivit docilement et ensemble ils partirent en direction de l'entrepôt des quatre chemins, point de ralliement des matières où elles seraient travaillées, transformées.

Selix Lyseus l'apostropha alors qu'il venait d'arriver :
« Oren Pyr mon bon Karius ! C'est à cette heure-ci que tu te ramènes ? »
Karius mena son mektoub devant le responsable des matières Meron Zessen qui le remercia en murmurant « Akep », tout en faisant des paquets en grimaçant après tant d'heures de travail. Son dos le faisait souffrir. Karius répondit au Fournisseur :
« Ney, j'ai plutôt bien travaillé aujourd'hui ! J'espère que ça avance bien ?
- Il paraît oué ! L'idée de notre sharükos est excellente, ça maintient en forme les patriotes et on ne voit plus que des mektoubs lancés au galop dans le Désert ! Ah sharükos, si tu voyais ton peuple !
- Ah, bien, bien, fit le fyros en souriant, je vais donc rentrer à Pyr voir si Lerris, mon homine, est rentrée, et me reposer...
- Et bien, Karius, ça m'ennuie de te demander cela après la journée que tu as eu, mais nous avons des livraisons en retard, et …
- Très bien, je m'en occupe. Ça me fera faire une petite balade... et j'ai encore de la liqueur de shooki ! »
Karius et Selix échangèrent des banalités tandis que Karius chargeait Shooki des paquets qu'il destinerait aux chantiers. Le tout était de ne pas se tromper de destinataire... Mais les gars sur les chantiers avaient l'habitude, il paraît.
Sur le départ, ils hurlèrent tous deux « Sharükos ékud » et Karius s'en fut, chevauchant son mektoub à bride abattue sur la sciure du Désert.

Alors qu'il venait de passer l'Oasis d'Offlovak, le mektoub se cabra, faisant tomber à terre son cavalier. Shooki s'enfuit en faisant tomber les paquets destinés aux chantiers, et sa pioche. Malheureusement la liqueur de shooki resta dans les fontes du mektoub. Quelques peu sonné, Karius regarda autour de lui pour comprendre d'où venait la peur du mektoub. Il ne vit rien, mais une odeur se fraya un chemin jusqu'à ses narines. Cette même odeur lui fit hérisser les poils de la nuque, créant une vague de peur intense qui cloua sur place le fyros. Cette odeur ... Horrible, venant des entrailles d'Atys ... Les kitins. Droit devant. Trois kirostas gris-bleu accompagnés de kidinaks.
Le fyros tenta de se lever, il ne le put. La peur avait créé les lianes de la détresse et maintenait dans sa toile le pauvre homin, qui ne put que regarder les kirostas rugir, et avancer lentement vers lui. Il ne put que saisir sa pioche, arme de fortune, tandis que les kitins piétinaient les paquets destinés aux camps militaires.

La bataille ne fut pas glorieuse, car il n'y a aucune gloire dans les combats inégaux. Le fyros ne chercha pas à se défendre, il tenta de se dégager et de courir pour atteindre les eaux profondes de l'Oasis qui n'était pas très loin. Il réussit, mais était gravement blessé. Rugissant, les kitins se désintéressèrent de leur proie pour jeter leur colère, ou leur faim, sur les armas venus se désaltérer. Karius, dans l'eau, toujours sa pioche en main, nagea lentement vers la rive opposée. Il était hors de danger. Regardant sa pioche, le visage livide, il sourit.

Poudre verte dans sa main. Douce sensation... Il ferma les yeux et se concentra avec difficulté, puis jeta d'un geste lent la poudre sur la sciure, et le bruit qui lui était familier sonna à ses oreilles. Il tomba à genoux. Mais il avait vu le Prince...

Ecrit par Lerris Xarinyx, en 2546, CA II.

¹ : Sharümal signifie « Enfant de la Tête », soit le Prince, en fyros.
² : Sharükos signifie « la Tête des homins », soit Empereur, en fyros.

Poudre de sciure

Nouvelles chroniques (31 comments)

Added by Chroniques d'Atys over 15 years ago

Voici la liste des chroniques nouvellement ajoutées dans la bibliothèque par l'archiviste :

  • Chronique des Sommets Verdoyants
    • La Lame, chronique relatant un côté d'Yrkanis, vu par Rodi di Varello.
  • Chroniques diverses

Le printemps où les tentes fleurirent (413 comments)

Added by Erlan over 15 years ago

Ainsi les discours des dirigeants se montrèrent-ils assez similaires et l'hominité toute entière sembla vouloir prendre pleinement possession des terres où elle avait choisi d'établir son Nouveau Commencement.

Même après deux générations, le traumatisme du Grand Essaim était encore si profondément ancré dans les esprits que les homins réagirent sans attendre lorsque des éclaireurs annoncèrent avoir aperçu quelques kitins inhabituels dans les Nouvelles Terres, comme l'annonçaient les dirigeants.

La menace fut vite identifiée comme négligeable, mais les dirigeants entreprirent la construction de campements à travers les territoires où leurs Peuples s'étaient installés plus de soixante années de Jena auparavant, pour fuir les kitins. Bientôt l'on pu voir des caravanes de mektoubs conduits par les Patriotes, les Sujets, les Citoyens et les Initiés silloner les chemins des Nouvelles Terres pour approvisionner la construction des campements militaires qui fleurissaient un peu partout sur l'Ecorce.

Ils furent nombreux à participer à l'édification de ces campements d'observation, qui en récoltant sur l'Ecorce les matières premières nécessaires aux bâtiments et aux défenseurs, qui en convoyant les ressources des entrepôts aux chantiers à dos de leurs mektoubs. Et les Maîtres d'Oeuvre furent vite sollicités car tous voulaient participer à la construction des campements avancés ; ils se nommaient Abytheus Abygrian qui attendait les Patriotes sur la place du Marché des bonnes Affaires à Pyr, Anibro Listi que l'on pouvait questionner aux étables d'Yrkanis, Ba'Darins Baksan placé à l'entrée de FairHaven sur le ponton menant à la fourche du Bon Marché ou encore Ba-Ci Du que les zoraïs surent trouver aux étables de Zora.

Je restitue ici les notes que prirent certains chroniqueurs du discours de leur dirigeant.

Suivent quatre feuillets retranscrivant les discours de l'Empereur, du Roi, du Gouverneur et du Grand Sage

Erlan, Chroniqueur
in Les Chroniques d'Erlan, 2546 CA II.

HRP : Vous trouverez ici l'avancement des chantiers.

Appel aux Peuples (124 comments)

Added by Erlan over 15 years ago

Au printemps du 2e CA de 2546*, les dirigeants homins entreprirent chacun de réunir leur peuple.

C'est ainsi, que des jours durant, les crieurs de l'Empire du Désert ardent, du Royaume des Sommets verdoyants, de la Fédération de la Nouvelle Trykoth et de la Théocratie du Pays malade rassemblaient les homins.

Patriotes, Sujets, Citoyens, Initiés ou non-citoyens, tous vinrent se réunir au même moment* auprès de leur dirigeant respectif dans les jours qui suivirent les annonces, convergeant vers l'Agora de Pyr, le Belvédère d'Yrkanis, la Place Frogmore de Fairhaven ou la Grand place de Zora.

Et si aucune de ces annonces ne mentionnaient les raisons de ces assemblées, la rumeur, elle, avait commencé de courir sur l'Ecorce. A l'agitation des agents impériaux, royaux, fédéraux ou dynastiques, il semblait évident que les dirigeants nourrissaient chacun de leur coté des projets similaires et que les bras et les bonnes volontés allaient être mis à contribution très prochainement.

Erlan, Chroniqueur
in Les Chroniques d'Erlan, 2546 CA II.

[*] Samedi 13 juin 2009, 21H.

Championnat Wiki (292 comments)

Added by vl over 15 years ago

Championnat Wiki prévu le vendredi 12 juin 2009 - 20h30 à Zora

Toutes les infos ici: http://tournois.misulud.fr

Note importante à l'intention des combattants:
Pensez bien à vider votre sac, vous devez porter sur vous 2 pièces légères (pantalon/robe + gilet)
et 2 tp max dans votre sac - RIEN DE PLUS !!!
Pas de bijoux, jetons, fleurs, oeufs et pensez à retirer votre tag PVP pour la soirée.
Le jour J, vous devez vous rendre au marchand de matières premières pour récupérer votre équipement et les MP.

Les duels seront joués au Poste Frontière de la Lande Tachetée.
Les spectateurs peuvent s'y rendre aux alentours de 21h, heure approximative du lancement.

(141-150/151)

Also available in: Atom